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NUREMBERG (1945-1946)

VERDICT

RESPONSABILITES INDIVIDUELLES

 

 

FRICK

 

Frick est inculpé des crimes visés par les quatre chefs de l'Acte d'Accusation. Spécialiste reconnu des questions administratives, il fit partie du Premier Cabinet de Hitler, à titre de Ministre de l'Intérieur du Reich. Il occupa ce poste important jusqu'en août 1940, date à laquelle il fut nommé Protecteur du Reich pour la Bohême-Moravie. Grâce à ces fonctions qui le plaçaient au centre de toute l'administration interne du pays il devint Ministre de l'Intérieur de Prusse, Directeur des Elections du Reich, Plénipotentiaire Général à l'Administration, ainsi que membre du Conseil de Défense du Reich, du Conseil ministériel pour la Défense du Reich et du « Conseil des Trois ». Lorsque les divers pays qui devaient être incorporés au Reich furent envahis, Frick fut placé à la tête des services centraux chargés de ces incorporations.

Encore que Frick n'ait adhéré officiellement au Parti Nazi qu'en 1925, il s'était déjà, lors du Putsch de Munich et alors qu'il était fonctionnaire du Département de la Police de cette ville, rangé aux côtés de Hitler et de la cause nationale-socialiste. Elu membre du Reichstag, en 1924, il devint Reichsleiter, en sa qualité de chef du groupe national-socialiste, de cette Assemblée.

 

Crimes contre la Paix

 

Frick, Nazi ambitieux, contribua activement à soumettre l'Allemagne à la domination absolue du Parti. Dès que Hitler fut devenu Chancelier du Reich, le nouveau Ministre de l'Intérieur commença à grouper les gouvernements régionaux sous la souveraineté du Reich. Les nombreuses lois qu'il élabora, signa et fit appliquer, eurent pour effet de supprimer tous les Partis d'opposition et ouvrirent en outre la voie à la Gestapo et aux camps de concentration que celle-ci utilisait pour anéantir toute opposition individuelle. Il fut l'auteur principal et impitoyable de la législation qui visait à éliminer les Syndicats, les Eglises et les Juifs.

Jusqu'à l'agression contre l'Autriche, Frick ne s'occupa que de l'administration intérieure du Reich. Il n'est pas prouvé qu'il ait assisté à aucune des conférences, au cours desquelles Hitler exposa ses intentions agressives. Le Tribunal estime, en conséquence, que Frick n'a pas participé au plan concerté ou complot en vue d'une guerre d'agression, tel qu'il est défini dans ce jugement.

Six mois après l'annexion de l'Autriche, Frick devint, en vertu de la Loi de Défense du Reich, du 4 septembre 1938, Plénipotentiaire général à l'Administration du Reich. Il fut prévu, au surplus, que, dans le cas où Hitler proclamerait l'« état de défense », Frick serait chargé de l'administration de guerre, exception faite pour le secteur militaire et économique. Les Ministères de la Justice, de l'Education et des Cultes furent, ainsi que l'Office des Questions d'Espace, placés sous son autorité. En s'acquittant de la tâche qui lui était confiée, Frick mit sur pied une organisation administrative qui était adaptée aux conditions de guerre et qui, selon ses propres déclarations, fut mise en jeu lorsque l'Allemagne eut décidé d'adopter une politique de recours à la force.

Frick signa la loi du 13 mars 1938, qui réunissait l'Autriche au Reich et il fut chargé de son exécution. Il établit en Autriche une administration allemande et prit des mesures législatives qui introduisaient dans ce pays, les lois du Reich, y compris les décrets de Nuremberg et la loi sur le service militaire; il confia les questions de police à Himmler.

C'est Frick, encore, qui signa les lois incorporant au Reich le pays des Sudètes, Memel, Dantzig, les territoires de l'Est (Prusse Occidentale et Posnanie) ainsi que ceux d'Eupen, de Malmedy et de Moresnet. Il fut chargé de l'exécution effective de ces incorporations et de l'établissement d'une administration allemande dans ces territoires. Il signa la loi établissant le Protectorat de Bohême et de Moravie.

En sa qualité de Chef des Services Centraux pour la Bohême et la Moravie, pour le Gouvernement Général et pour la Norvège, il eut la mission de susciter une étroite coopération entre les administrateurs allemands de ces territoires et les Autorités suprêmes du Reich. Dans tous les pays occupés, il nomma du personnel administratif et tint Rosenberg au courant des désignations effectuées dans les territoires de l'Est. Enfin, il signa les lois qui nommaient Terboven, commissaire du Reich en Norvège, et Seyss-Inquart, Commissaire du Reich en Hollande.

 

Crimes de guerre et crimes contre l’Humanité

 

Antisémite fanatique, Frick prépara, signa et fit appliquer un grand nombre de lois destinées à éliminer les Juifs de la vie et de l'économie allemandes. Son œuvre législative fut à la base des décrets de Nuremberg, qu'il s'occupa activement à appliquer. Après avoir interdit aux Juifs l'exercice de certaines professions et confisqué leur fortune, il signa finalement, en 1943, après les exterminations massives de Juifs opérées à l'Est, un décret qui les plaçait « hors la loi » et remettait leur sort aux mains de la Gestapo. Ces mesures, qui ouvraient la voie à la « solution finale », furent étendues par l'accusé aux territoires incorporés ainsi qu'à certains des territoires occupés. Pendant la période où il fut Protecteur du Reich pour la Bohême et la Moravie, des milliers de Juifs furent transférés du ghetto de Terezin, en Tchécoslovaquie, à Auschwitz, où ils furent tués. Il institua par décret une procédure pénale d'exception, applicable aux Juifs et aux Polonais du Gouvernement Général.

Bien que la Police fut théoriquement subordonnée au Ministre de l'Intérieur, Frick avait en fait peu d'autorité sur Himmler et sur les questions de police en général. Quoi qu'il en soit, c'est lui qui avait signé la loi nommant Himmler Chef de la Police allemande, ainsi que les décrets plaçant les camps de concentration sous l'autorité de la Gestapo et réglementant l'exécution des ordres d'internement de protection. Etant donné les nombreuses plaintes dont Frick eut connaissance et compte tenu des témoignages produits au cours des débats, le Tribunal estime que l'accusé connaissait les atrocités commises dans ces camps. En pleine connaissance des méthodes qu'employait Himmler, Frick l'autorisa, par décret, à prendre dans certains des territoires occupés les mesures de sécurité qu'il jugerait nécessaires. Or, on sait ce que furent ces « mesures de sécurité ».

En sa qualité d'Autorité suprême du Reich en Bohême et en Moravie Frick porte la responsabilité générale des actes d'oppression qui furent commis dans ce territoire, après le 20 août 1943 : mesures de terreur contre la population, travail forcé, déportation et extermination des Juifs dans les camps de concentration. Il est vrai que les attributions que conférait à Frick son poste de Protecteur du Reich, étaient beaucoup plus restreintes que celles de son prédécesseur; il est encore vrai qu'il n'avait aucun pouvoir législatif et que son autorité personnelle dans le Protectorat était limitée. Néanmoins, Frick savait parfaitement en quoi consistait, à cette époque, la politique nazie d'occupation, en particulier à l'égard des Juifs. En acceptant ce poste de Protecteur du Reich, il assuma la responsabilité de l'exécution de cette politique en Bohême et en Moravie. Les questions de nationalité, tant dans les pays occupés que dans le Reich, furent placées sous sa juridiction lorsqu'il était Ministre de l'Inférieur. Après avoir établi un registre racial des personnes d'origine allemande, Frick conféra à certaines catégories de citoyens de pays étrangers la nationalité allemande. Il est responsable de la germanisation qui fut pratiquée en Autriche, dans le pays des Sudètes, à Memel, à Dantzig, dans les territoires de l'Est (Prusse Occidentale et Posnanie), et dans ceux d'Eupen, Malmedy et Moresnet. Il imposa aux ressortissants de ces régions les lois allemandes, les Tribunaux allemands, l'éducation allemande, la police allemande, ainsi que le service militaire obligatoire.

Ainsi qu'il a été dit plus haut, l'euthanasie fut pratiquée, pendant la guerre, dans des sanatoriums, des hôpitaux et des asiles placés sous l'autorité de Frick. Il savait que des aliénés, des personnes malades et âgées, des « bouches inutiles », étaient mis à mort d'une façon systématique ; des plaintes lui parvinrent au sujet de ces meurtres, mais il ne fit rien pour faire cesser ces agissements. Un rapport de la Commission Tchécoslovaque des Crimes de Guerre a estimé que, parmi les personnes atteintes de déficience mentale ou âgées dont Frick avait la charge, 275.000 furent victimes de ces mesures.

 

Conclusion

 

Le Tribunal déclare :

— Que l'accusé Frick n'est pas coupable des crimes visés par le premier chef de l'Acte d'Accusation;

— Que l'accusé Frick est coupable des crimes visés par les deuxième, troisième et quatrième chefs de l'Acte d'Accusation.

 

 

 

 
   
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

         

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