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NUREMBERG (1945-1946)

VERDICT

RESPONSABILITES INDIVIDUELLES

 

 

JODL

 

Jodl est inculpé des crimes visés par les quatre chefs de l'Acte d'Accusation. De 1935 à 1938, il fut chef de la Section de la Défense Nationale dans le Haut-Commandement des Forces Armées. Après une année passée dans une unité, il devint, en août 1939, Chef de l'Etat-Major d'Opérations du Haut-commandement des Forces Armées. Bien qu'il ait eu Keitel comme supérieur immédiat, il était en relations directes avec Hitler, pour toutes les questions d'opérations militaires. Du point de vue strictement militaire, Jodl fut le véritable instigateur de la guerre et l'un des principaux responsables de la stratégie et de la conduite des opérations.

Jodl allègue pour sa défense le fait qu'il était un soldat, forcé à l'obéissance, et non pas un politicien; il ajoute que son travail d'Etat-Major prenait tout son temps. Il a dit que, lorsqu'il signait ou contresignait des ordres, des mémorandums et des lettres, il le faisait souvent au nom de Hitler et de Keitel, en l'absence de ce dernier. Bien que devant obéissance à Hitler en tant que soldat, il prétend avoir souvent essayé de s'opposer à certaines mesures en les retardant, et y avoir parfois réussi. Il en fut ainsi quand il résista à Hitler qui demandait que fût donné l'ordre de lyncher les « aviateurs terroristes » alliés.

 

Crimes contre la Paix

 

D'après le journal de Jodl, en date des 13 et 14 février 1938, Hitler donna à ce dernier, ainsi qu'à Keitel, l'ordre de maintenir la pression armée que, lors de la conférence avec Schuschnigg, l'on avait commencé d'exercer contre l'Autriche, en simulant des mesures militaires qui, d'ailleurs, atteignirent leur but. Quand Hitler décida de « ne pas tolérer » le plébiscite de Schuschnigg, Jodl produisit, au cours de la Conférence, « l'ancien projet », c'est-à-dire le plan tel que l'avait conçu l'Etat-Major. Son journal montre, le 10 mars, que Hitler ordonna alors la préparation du « Cas Otto » par une directive que contresigna Jodl.

Jodl publia, le 11 mars, des instructions additionnelles et parapha l'ordre d'invasion donné par Hitler pour le jour même.

D'après les notes de Schmundt, Jodl fut très actif dans les préparatifs d'attaque contre la Tchécoslovaquie. Il parapha les articles 14, 17, 24, 36 et 37 de ces notes. Jodl reconnaît qu'il était d'accord avec l'O.K.H. pour que l'« incident » qui devait fournir un prétexte à l'intervention de l'Allemagne se produisit au plus tard à quatorze heures, le jour X-I, jour précédant l'attaque ; et il admet, en outre, avoir précisé que l'heure fixée pour cet incident devait être telle que les conditions atmosphériques fussent favorables au vol. Avec les spécialistes de la propagande, il s'entretint des « tâches communes imminentes » résultant notamment des violations du Droit International par l'Allemagne, de leur exploitation par l'ennemi et de leur réfutation par les Allemands, « tâches » que Jodl jugeait « particulièrement importantes ».

Après Munich, Jodl écrivait :

La Tchécoslovaquie a disparu en tant que puissance... Le génie du Führer et sa détermination à ne pas reculer, même devant une Guerre mondiale, ont permis à nouveau de remporter la victoire, sans recourir à la force. Nous gardons l'espoir que les incrédules, les faibles et les hésitants sont maintenant convertis et le resteront.

Peu après l'occupation des Sudètes, Jodl fut détaché dans une unité. Il ne devint chef de l'Etat-Major d'Opérations de l'O.K.W. qu'à la fin du mois d'août 1939.

Le 12 décembre 1939, Jodl discuta de l'invasion de la Norvège avec Hitler, Keitel et Raeder ; son journal est rempli de notes postérieures sur le rôle qu'il avait joué dans les préparatifs de cette attaque. Jodl explique que son commentaire selon lequel Hitler cherchait encore une « excuse » pour entrer en action, signifiait qu'il attendait des renseignements dignes de foi sur les plans britanniques et il justifie l'invasion comme une opération nécessaire pour prévenir l'exécution de ces plans. Son témoignage montre que, depuis le mois d'octobre 1939, Hitler projetait d'attaquer les nations de l'Ouest en passant par la Belgique, mais ne pensait pas pouvoir envahir la Hollande avant la mi-novembre. Le 8 février 1940, Jodl, son représentant Warlimont et Jeschonnek, chargés des questions stratégiques aériennes, discutèrent la « nouvelle idée » d'attaquer la Norvège, le Danemark et la Hollande, tout en garantissant la neutralité de la Belgique. La plupart des dix-sept ordres qui, pour différentes raisons, notamment à cause des conditions atmosphériques, remettaient au mois de mai 1940, l'attaque à l'Ouest, furent signés par Jodl.

Il s'occupa activement des préparatifs d'attaque contre la Grèce et la Yougoslavie et parapha l'ordre d'intervenir en Albanie, qu'avait donné Hitler le 11 janvier 1941. Le 20 janvier, quatre mois avant l'attaque, Hitler, au cours d'une réunion des généraux allemands et italiens à laquelle assistait Jodl, déclara que les troupes allemandes rassemblées en Roumanie devaient être utilisées contre la Grèce. Le 18 mars, Jodl était présent encore lorsque Hitler dit à Raeder que toute la Grèce devait être occupée avant qu'une solution ne pût intervenir. C'est en sa présence également que, le 27 mars, Hitler déclara, devant le Haut-Commandement, que la Yougoslavie devait être anéantie avec une « rigueur impitoyable » et que Belgrade devait être bombardée sans déclaration de guerre.

Jodl a déclaré que Hitler craignait une attaque de la Russie et que c'est pour cette raison qu'il attaqua le premier. Ces préparatifs avaient commencé presque un an avant l'invasion. Dès le 29 juillet 1940, en effet, Jodl invita Warlimont à dresser des plans en lui disant que Hitler avait décidé d'attaquer ; plus tard, Hitler dit à Warlimont qu'il avait pris cette décision dès le mois d'août 1940, mais qu'il en avait retardé l'exécution pour des raisons militaires. Jodl parapha la directive de Hitler du 12 novembre 1940, selon laquelle les préparatifs ordonnés verbalement devaient être poursuivis et, le 18 décembre, parapha également le « Cas Barbarossa ». Le 3 février 1941, Jodl discuta avec Hitler et Keitel de l'invasion et, le 14 juin, il était présent lorsque furent faits les derniers rapports sur le « Cas Barbarossa ».

 

Crimes de guerre et crimes contre l’Humanité

 

Le 18 octobre 1942, Hitler édicta l'ordre sur les Commandos et, le lendemain, fit une note explicative supplémentaire à l'intention des officiers seulement. Le Mémorandum qui accompagnait cet ordre était signé par Jodl et les avant-projets avaient été établis par ses services et d'accord avec lui. L'accusé a déclaré dans sa déposition qu'il était fermement opposé à l'esprit de ces directives aux points de vue moral et juridique, mais qu'il ne put refuser de les transmettre. Il insiste sur le fait qu'il essaya d'amoindrir les effets de ces mesures en ne faisant pas connaître à Hitler les cas où elles n'étaient pas exécutées. Il parapha le mémorandum de l'O.K.W., en date du 25 juin 1944, qui maintenait l'ordre après les débarquements de Normandie.

La directive relative au « Cas Barbarossa » contenait un plan d'élimination des Commissaires Soviétiques, d'après lequel ces derniers pouvaient être exécutés sans jugement, sur la seule décision d'un officier. Un projet, contenant une note manuscrite de Jodl, suggérait que de telles mesures fussent présentées comme mesures de représailles. L'accusé a soutenu néanmoins dans sa déposition que, par la façon dont il a rédigé cette note, il a tenté de s'opposer à l'exécution de cet ordre.

Quand Hitler, en 1945, envisagea de dénoncer la Convention de Genève, Jodl lui fit remarquer qu'il en résulterait plus d'inconvénients que d'avantages. Le 21 février, il lui déclara que le fait d'avoir signé la Convention ne gênait pas la conduite de la guerre et lui cita, en exemple, le cas d'un navire-hôpital anglais coulé en représailles, ce qu'il qualifia d'erreur. Il a affirmé avoir adopté cette attitude, parce que c'était la seule que Hitler pût prendre en considération et que les arguments moraux ou légaux ne servaient de rien ; il prétend avoir ainsi empêché Hitler de dénoncer la Convention.

Les preuves montrant que Jodl se serait occupé activement du programme de travail obligatoire ont été peu nombreuses. Il eut, en effet, à s'absorber dans ses préparatifs stratégiques. Cependant, dans son discours aux Gauleiters, le 7 novembre 1943, il affirma la nécessité d'obliger, avec une vigueur et une résolution impitoyables, les travailleurs du Danemark, de la France et des Pays-Bas à construire le Mur de l'Atlantique.

Par un télétype du 28 octobre1944, Jodl ordonna l'évacuation de tous les habitants de la Norvège Septentrionale et l'incendie de leurs maisons pour les empêcher d'aider les Russes. Jodl affirme qu'il était opposé à ces mesures mais qu'elles furent ordonnées par Hitler et ne furent d'ailleurs pas totalement exécutées. Un document émanant du Gouvernement Norvégien déclare pourtant que cette évacuation de la Norvège Septentrionale a bien eu lieu et que 30.000 maisons d'habitation ont été endommagées.

Le 7 octobre 1941, Jodl signa un ordre communiquant la décision de Hitler de ne pas accepter la reddition de Léningrad ni celle de Moscou, qui d'ailleurs ne furent jamais offertes ; l'accent était mis au contraire sur la nécessité qu'il y avait de raser ces villes. Jodl prétend que cette décision était dictée par la crainte qu'elles ne fussent minées par les Russes comme l'avait été Kiev.

Sa défense repose, dans ses grandes lignes, sur la théorie des « ordres supérieurs » qui a été rejetée par l'article 8 du Statut. Aucune circonstance atténuante ne peut être invoquée en sa faveur. Aucun soldat n'a jamais été tenu de participer à de tels crimes et Jodl ne peut se justifier de les avoir commis, en s'abritant derrière la mystique d'une obéissance militaire aveugle.

 

Conclusion

 

Le Tribunal déclare :

— Que Jodl est coupable des crimes visés par les quatre chefs de l'Acte d'Accusation.

 

 

 
   
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

         

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